Le mois dernier, nous vous avons expliqué pourquoi nous tenons à créer un refuge. Ce mois-ci, nous allons vous parler des différentes étapes que vivra un animal confié à un centre de secours. Cet article est une compilation des meilleures méthodes à nos yeux et des bonnes idées que nous avons pu observer lors d’expériences personnelles au sein d’autres centres. Cela reflète également la méthode que nous voulons adopter.

Pour information, en illustration ci-dessus : un Kinkajou en plein repas.

Arrivée au centre

Chaque animal qui arrive dans un centre doit d’abord être examiné dans la clinique pour savoir s’il est blessé ou malade. Si oui, les soins nécessaires lui sont de manière immédiate. Les points importants pouvant empêcher une éventuelle remise en liberté sont également vérifiés. Après ces contrôles, l’animal est mesuré, pesé, son âge est estimé et ses signes distinctifs sont mis en lumière pour remplir sa fiche de soin. La fiche de soin sert au suivi de chaque individu. Ensuite, l’animal peut être transféré en zone de quarantaine.

Il est nécessaire que tous les animaux soient observés un temps en zone de quarantaine pour éviter toute contagion avec les autres animaux. La durée de celle-ci est déterminée selon les espèces par le temps d’incubation des maladies présentes dans la région. Pendant ce laps de temps, les soigneurs observent s’il n’a pas de problème pour manger ou se déplacer et jugent de son état psychologique.

Dans le cas où l’état de l’animal nécessite des soins quotidiens ou très réguliers, il restera dans la clinique vétérinaire ou à proximité. En effet, s’il est nécessaire de l’attraper régulièrement, il est plus pratique mais aussi moins stressant pour lui de le laisser dans une petite cage au calme.

Lorsque la quarantaine est terminée, c’est-à-dire que l’animal ne présente aucun souci de santé et qu’il est vermifugé, il peut alors être transféré ailleurs dans le centre.

Toutefois, si l’animal vivait dans la nature avant d’arriver au centre (blessure, retrouvé dans un village), le mieux serait de le soigner le plus rapidement possible et de le relâcher dès qu’il va mieux, sur ou proche du lieu où il a été trouvé.

Ci-dessous : Jeune Ours à lunettes en quarantaine dans un centre.

Le quotidien

Les tâches quotidiennes consistent principalement à nettoyer la cage et à nourrir l’animal tout en vérifiant qu’il aille bien (état général, comportement, état des selles).

Il y a plusieurs solutions concernant l’entrée du soigneur dans la cage :

  • La meilleure : La cage se divise en 2 parties distinctes, le ou les animaux sont isolés d’un côté par une grille et ainsi le soigneur peut entrer sans risque dans la partie vide. Il en profite pour nettoyer la cage et disséminer la nourriture. La séparation rouverte, les animaux se dirigent vers la nourriture et nous pouvons alors se concentrer sur la deuxième partie.
  • Une autre solution est de disposer d’une petite cage rattachée à la grande. Alors, l’animal est attiré dedans avec de la nourriture, puis une fois enfermé, le soigneur peut intervenir librement.
  • Pour le cas des espèces nocturnes ou pour un animal qui reste beaucoup dans sa cabane où dormir, nous pouvons directement mettre une trappe sur celle-ci.

L’idéal est que l’animal ait le moins de contact possible avec les humains. C’est particulièrement le cas de ceux qui ont une chance d’être relâchés.

En plus du nettoyage et du nourrissage, il est souhaitable d’enrichir le milieu de vie de l’animal. Les enrichissements sont primordiaux pour son bien-être et nécessaire en vue d’un relâcher.

Ci-dessous : un perroquet Amazone se nourrissant

Les enrichissements

Un animal en captivité ne peut pas reproduire tous ses comportements naturels, qu’il réaliserait chaque jour à l’état sauvage, notamment en ce qui concerne la recherche de nourriture. Il se contente parfois d’attendre qu’on lui donne à manger et bouge très peu, faute d’être suffisamment stimulé. Les enrichissements sont des « stimulations » cherchant à susciter un comportement inexistant, favoriser un comportement positif existant ou/et atténuer voire éliminer un comportement néfaste. Pour cela, il faut essayer de recréer, en cage, des situations de leur quotidien dans la nature.

Le résultat est bénéfique sur tous les points :

  • L’animal se dépense plus et il est donc en meilleure forme physique.
  • L’animal est stimulé positivement donc il est plus épanoui.
  • L’animal retrouve des comportements qu’il a dans la nature, si le relâcher est envisagé, cet aspect est particulièrement important.

Arriver à de bon résultat demande toutefois beaucoup de temps. Il faut bien adapter l’enrichissement à l’espèce mais aussi à l’individu. De plus, les exercices se doivent être diversifiés et imprévisibles. Enfin, il faut que le temps que l’animal consacre à un comportement soit en accord avec le temps qu’il y passerait dans la nature, ce qui inclut une bonne connaissance de l’espèce en question.

La première chose que l’on peut considérer comme un enrichissement est l’agencement de l’intérieur de la cage. Une cage bien aménagée et bien adaptée à son occupant est comme un enrichissement permanent. Lors de sa construction, il faut également réfléchir à des emplacements pour les enrichissements temporaires. La cage doit aussi comporter des endroits pour se cacher.

La manière de donner la nourriture se doit aussi de recréer la situation dans la nature. La nourriture doit être au maximum disséminée et cachée dans la cage afin que l’animal la cherche et passe du temps à la trouver. Les aliments doivent être donner dans la forme dans laquelle ils se trouvent dans la nature (les fruits doivent être entiers par exemple). L’exemple de la banane reflète bien l’idée générale : lorsque l’on doit donner des bananes à un animal arboricole, l’idéal est de suspendre un régime entier de banane de manière permanente. Les mettre lorsqu’elles ne sont pas mûres peut être une idée pour apprendre à l’animal le bon moment pour la manger. Bien sûr, nous parlons ici d’un idéal, il faut aussi savoir adapter nos pratiques afin d’éviter le gaspillage alimentaire.

Pour finir, ne pas donner la nourriture à heure fixe et ne pas donner tous les jours les mêmes proportions serait très intéressant mais malheureusement cela est difficile à mettre en pratique et nécessite un suivi important.

Si son environnement, son menu et sa manière de se nourrir sont au plus proche des conditions en milieu naturel, l’animal a toutes les chances de se sentir bien.

Voici quelques autres exemples d’enrichissement :

  • cacher de la nourriture sous un tas de feuilles,
  • cacher de la nourriture dans un trou recouvert par des bouts de bois ou des pierres,
  • mettre dans la cage de la terre comportant des vers de terre,
  • donner des insectes vivants,
  • lancer des petites croquettes partout dans la cage pour obliger l’animal à fouiller les moindres recoins,
  • dans le cas où l’espèce fait un nid, mettre les éléments qui le composent à divers endroits de la cage,
  • tracer un chemin odorant avec de la nourriture au bout,
  • mettre une touffe de poils d’un autre animal dans la cage,
  • changer la disposition des éléments de sa cage,
  • mettre des proies vivantes aux prédateurs…

Vous trouverez ci-dessous, deux exemples d’enrichissements.

 

Les enrichissements sont d’autant plus importants dans les centres de soin comme celui que nous voulons créer car certains animaux n’ont que très peu vécu dans la nature. De mauvaises habitudes (alimentaires ou comportementales) sont prises lors de leur détention illégale. Par exemple certains singes arrivent en centre de secours, habitués à manger des biscuits et à boire à la paille. Ceux capturés petits et mis dans une cage pour le trafic n’ont quasiment jamais côtoyé de comportements typiques de leur espèce. Dans ces cas là, il faudra avancer par petites étapes pour espérer arriver à un résultat. Il est important de garder en tête que certains animaux sont trop marqués et ne sont pas réceptifs aux tentatives d’enrichissements.

Libérer l’animal

Cette dernière étape fait partie de nos grands objectifs pour le refuge. Malheureusement cela n’est pas possible avec tous les individus. Mais nous détaillerons davantage cette étape dans un prochain article, le mois prochain.

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